Quatre B Corp expliquent comment elles ont réussi à instaurer la semaine de quatre jours
November 19, 2024
Conseils, politiques et cadres de travail pour les entreprises afin d’atteindre un meilleur équilibre entre travail et bien-être
La transition vers la semaine de travail de quatre jours comporte des implications à plusieurs niveaux pour les entreprises. Tandis que les avantages potentiels, notamment l’amélioration du bien-être des employé.e.s et de la performance commerciale, sont universels, les tenants et les aboutissants des processus engagés dans ce changement varient d’une organisation à l’autre. De nombreux dirigeant.e.s d’entreprises se montrent sceptiques quant à la faisabilité des tâches nécessaires pour demeurer en activité dans une plage horaire réduite.
En tant qu’organisations à but lucratif qui recherchent en permanence des manières significatives d’augmenter leur impact positif sur les personnes et la planète, certaines entreprises certifiées B font partie des primo-adoptant.e.s de la semaine de travail de quatre jours. L’organisme sans but lucratif régional qui chapeaute la certification B Corp, le B Lab États-Unis et Canada, a adopté la semaine de quatre jours avec comme objectifs d’aider les employé.e.s à venir au travail en se sentant plus reposé.e.s et de leur faire confiance pour accomplir leurs tâches en un nombre d’heures réduit.
Afin de permettre aux dirigeant.e.s d’entreprises de mieux comprendre ce à quoi ressemble en pratique la transition vers une semaine de quatre jours, B The Change a pris contact avec plusieurs B Corp qui ont restructuré leurs horaires. Elles ont répondu à l’appel et offert un aperçu des étapes graduelles qu’elles ont suivies pour réduire leurs heures de travail tout en maintenant leur productivité et leur rentabilité. D’une manière générale, elles ont mis l’accent sur la nécessité de communiquer, de faire preuve de transparence et de flexibilité, ainsi que de rendre des comptes, lorsque tout se déroule bien, mais aussi lorsque les choses deviennent un peu chaotiques.
Dans les témoignages ci-dessous, les dirigeant.e.s de B Corp suivant.e.s donnent un aperçu de certains défis et avantages découverts au cours de leurs expériences et font part de conseils aux entreprises qui envisagent de suivre une voie similaire :
- Donna Cheung de Wakefield Agency [en anglais], une agence de production vidéo basée à Vancouver;
- Carolina Miranda de Cultivating Capital [en anglais], une société de conseils spécialisée dans la certification B Corp;
- Elise Allyn de Conscious Revolution [en anglais], une entreprise basée dans le Maine qui offre des services de consultation en leadership, notamment de l’accompagnement, des expériences communautaires uniques et des conseils en organisation;
• Dominic Tremblay de Tux Creative, une agence de création avec des bureaux à Los Angeles et à Montréal qui offre des services de conception, d’image de marque et de communication.
10 choses à savoir à propos des B Corp
La certification B Corp représente un jalon et un accomplissement majeurs, mais il s’agit seulement d’une étape dans le parcours d’amélioration continue de l’impact d’une entreprise. Ce guide téléchargeable contient des renseignements pour les personnes qui découvrent ou qui sont curieuses au sujet de la communauté des entreprises certifiées B.
Wakefield Agency : Offrir un cadre pour la formation, la gestion du temps et la transparence
Pour Donna et Nouver Cheung de Wakefield Agency, une B Corp basée à Vancouver, la transition vers la semaine de travail de quatre jours a coïncidé avec la décision de leur famille de pratiquer le sabbat, c’est-à-dire prendre une période de 24 heures pour se reposer, profiter de la nature et entretenir leurs relations. Le rythme à la maison basé sur ces règles de vie les a amenés à faire plusieurs constatations qui s’appliquent également au lieu de travail. « Il ne s’agit pas d’atteindre la perfection; il faut procéder par tâtonnement », a déclaré Donna Cheung. « Nous ne sommes pas des robots qu’on active et désactive. Nous avons besoin de temps pour nous préparer et ralentir le rythme, pour être des personnes humaines. »
D’après elle, l’idée d’essayer la semaine de travail de quatre jours est née au cours des discussions fréquentes sur les valeurs de Wakefield Agency, qui sont l’authenticité, l’accompagnement et l’impact. Lorsque l’agence de production vidéo a décidé d’essayer le nouvel horaire, elle s’est fixée comme objectif de demeurer compétitive avec les entreprises ayant des semaines de travail de 40 heures, cinq jours par semaine. Ceci a signifié de mettre un accent sur les finances et l’efficacité, ainsi que d’adopter des processus pour renforcer la transparence et la prise de responsabilité.
Cheung a expliqué que l’agence a suivi des étapes intentionnelles afin de se préparer au changement, notamment une formation sur la productivité pour aider les membres de l’équipe à gérer leur temps et leurs tâches, ainsi que le suivi du temps pour susciter une prise de responsabilité et pour collecter des indicateurs afin d’élaborer des propositions et des budgets. L’équipe s’est concentrée sur le travail basé sur les résultats en effectuant des vérifications fréquentes auprès des client.e.s et en mesurant leur satisfaction.
« Nous avons également intégré une flexibilité dans notre modèle. En effet, nous avons commencé par ne plus organiser de réunions les vendredis, ce qui a ensuite entraîné la consécration de cette journée au perfectionnement professionnel, pour enfin devenir une journée de congé flexible », a continué Cheung. « Si les membres de l’équipe souhaitent profiter des vendredis pour régler les derniers détails d’un projet, la décision leur revient. Cependant, personne n’est tenu.e de travailler ou de répondre à des communications ce jour-là. Nous avons habitué notre clientèle à cette attente. »
L’agence a mis en priorité des communications régulières au sujet de la semaine de travail de quatre jours avec les membres de l’équipe par le biais de suivis hebdomadaires, ainsi que de revues annuelles des directives relatives au travail à distance, afin de soutenir la prise de responsabilité et la transparence. « Ce système nous permet de reconsidérer les objectifs que nous nous sommes fixé.e.s et de nous remettre en phase avec les attentes si nous nous en sommes détourné.e.s », a expliqué Cheung.
La communication de l’aspect financier du changement d’horaires au personnel constitue un autre élément important. « Entretenez les conversations au sein de l’équipe afin de sensibiliser les employé.e.s à la valeur de chaque heure de travail et à la manière d’apporter cette valeur à notre clientèle », a affirmé Cheung. « Il est essentiel d’inciter à une meilleure gérance des objectifs et des résultats. Chaque collaborateur et chaque collaboratrice doit savoir comment son travail peut directement influencer le résultat net dans le parcours de la clientèle. »
Selon Cheung, il faut faire preuve d’authenticité et d’honnêteté pour guider une équipe au travers du changement. « Examinez votre vie et réfléchissez à votre véritable conception du mieux-être. Vous ne pouvez pas guider les gens vers des endroits où vous n’êtes jamais allé.e », a-t-elle avancé. « Faites part à votre équipe de vos apprentissages. De plus, initiez la conversation sur les valeurs de l’entreprise, ainsi que sur les espoirs et les souhaits de vos collaborateurs et de vos collaboratrices, quant à la manière dont ils et elles veulent se manifester et créer de la valeur pour l’organisation. »
Mais surtout, elle encourage les autres entreprises à se lancer, puis à adapter leurs approches au besoin : « Essayez, itérez et prenez du plaisir dans ce processus ». (Elle sera également ravie de répondre aux questions sur le passage à la semaine de travail de quatre jours que vous pouvez lui adresser en remplissant ce formulaire [en anglais].)
Cultivating Capital : Demeurer flexible et maintenir les voies de communication ouvertes
D’après la fondatrice de Cultivating Capital, Carolina Miranda, le projet pilote mené par le B Lab États-Unis et Canada a inspiré sa décision d’essayer la semaine de travail de quatre jours. « Il y avait tout d’un coup un modèle très pratique à suivre », a-t-elle déclaré. Toutefois, il s’agit aussi d’un modèle qui peut être adapté aux réalités de chaque entreprise. « Dans notre cas, le modèle diffère du projet pilote que nous avons initialement mené, et je m’attends à ce qu’il continue d’évoluer au fil du temps. »
Selon Miranda, il est important de se montrer disposé.e à écouter, à tenir compte des avis, à communiquer et à ajuster ses processus lorsqu’on essaie de nouvelles choses en tant qu’entreprise. « Élaborez quelques lignes directrices raisonnables et préparez-vous à itérer votre approche sur la base des rétroactions et de votre expérience », a-t-elle déclaré. « Assurez-vous de communiquer au sujet de ce que vous faites aux parties prenantes concernées. »
Cultivating Capital est une agence qui aide les entreprises à s’orienter au travers du parcours de certification B Corp et la totalité de son travail est effectué en ligne. Miranda a ainsi expliqué que le fait de passer huit heures par jour en face d’un ordinateur n’est pas une solution optimale pour maintenir une productivité soutenue. « Par conséquent, nous nous sommes posé.e.s cette question : “et si nous prenions le total d’heures d’une semaine de quatre jours, soit 32, pour le répartir sur cinq jours?” ». Les membres de l’équipe peuvent désormais choisir de travailler 6,5 heures par jour sur cinq jours ou les huit heures par jour sur quatre jours. De plus, les employé.e.s peuvent passer d’un système à l’autre selon leurs besoins.
D’après Miranda, la décision de mettre à l’essai la semaine de quatre jours chez Cultivating Capital durant l’été incarne la conviction de la B Corp que la réussite de l’entreprise et le bien-être des employé.e.s sont reliés. « Nous nous sommes engagé.e.s à remettre en cause les normes traditionnelles du lieu de travail et à démontrer que les entreprises peuvent prospérer tout en mettant en priorité l’harmonie entre le travail et la vie personnelle. Nous surveillons d’ailleurs des IRC (indicateurs de rendement clés) liés au bien-être sur une base quotidienne », a-t-elle affirmé. « Nous croyons que la productivité n’est pas une question relative au nombre d’heures travaillées, mais à la création de conditions dans le cadre desquelles les gens peuvent fournir leur plein potentiel. Le fait d’avoir une fin de semaine de trois jours régulièrement est bénéfique au moral et à la productivité. »
L’avenir du travail, c’est aujourd’hui
La communauté des entreprises certifiées B sait que les profits ne doivent pas être gagnés au détriment des autres parties prenantes. Pour en savoir plus, consultez ce rapport téléchargeable.
Conscious Revolution : Faire de la place pour l’humanité et le relationnel
En tant que société de conseils aidant à la création d’entreprises écoresponsables, le but de Conscious Revolution est d’offrir une culture du travail qui reconnait l’existence d’une vie en dehors de celui-ci. « L’une de nos valeurs est d’accorder une place centrale à l’humanité. Pour être une personne humaine, vous avez besoin d’espace, de rires, de limites, d’humilité et de relations », a déclaré la conseillère associée et analyste principale, Elise Allyn. « La semaine de travail de quatre jours permet à nos collaborateurs et à nos collaboratrices d’avoir le temps et l’espace d’explorer des loisirs, de prendre soin d’eux, d’elles et de leurs proches, et d’une façon plus générale, d’être des personnes à part entière, et pas seulement des employé.e.s. »
La décision d’essayer la semaine de quatre jours a été motivée par l’exemple d’une entreprise cliente qui l’avait mise en place. « Lorsque nous avons appris que cette entreprise allait mettre à l’essai la semaine de quatre jours à partir de mai 2023, notre première réaction a été : “si elle peut le faire, nous aussi” », a expliqué Allan. Conscious Revolution a suivi des étapes graduelles lors de sa transition, en commençant par une période de six mois sans rendez-vous avec les client.e.s les vendredis. « Cette étape a permis de rendre le passage aux vendredis sans travail beaucoup plus facile pour notre clientèle, car elle ne s’attendait déjà plus à nous voir », a-t-elle affirmé.
La transition de l’entreprise ne s’est pas faite sans quelques heurts au cours du parcours. Par exemple, la B Corp a éprouvé des difficultés à faire en sorte que tout le monde ne travaille que quatre jours. « Ce n’est pas très amusant si vous avez un collaborateur ou une collaboratrice qui a l’impression de devoir travailler ce cinquième jour et qui envoie des milliers de courriels à toute l’équipe », a commenté Allyn.
Elle a souligné qu’il était important de ne pas oublier la raison à l’origine de ce changement au moment de définir la manière de le mettre en place et de faire preuve de créativité lorsque des défis surviennent. « L’avantage de ce modèle est que les collaborateurs et les collaboratrices sont davantage actifs et actives, ainsi que pleinement engagé.e.s », a-t-elle avancé. « Je ne ressens plus “l’angoisse du dimanche soir”, car j’ai l’impression d’avoir vraiment eu la possibilité d’effectuer mes tâches domestiques, de passer du temps avec des ami.e.s et de recharger mes batteries d’une manière significative. Je suis prête pour aller travailler le lundi. »
Tux : Libérer de l’espace pour la créativité et le bien-être personnel
Tux Creative est passée à la semaine de travail de quatre jours il y a environ trois ans, avec l’objectif de favoriser la créativité sur le lieu de travail et le bien-être personnel. D’après son fondateur, Dominic Tremblay, cette transition constitue une autre étape dans le parcours de l’agence en tant que pionnière du secteur. « Étant donné que le talent est notre principal atout, nous essayons constamment de mieux soutenir nos équipes et de bâtir une agence de création axée d’abord sur la culture, avec la conviction que les grandes idées naissent lorsque le talent est bien géré », a-t-il déclaré. « Compte tenu de l’accent mis sur nos talents, il est important de rester en phase avec les pratiques actuelles. »
Tremblay s’est inspiré du livre d’Alex Soojung-Kim Pang, Shorter (Titre non disponible en français, traduction suggérée : Raccourci), qui explore la manière dont les entreprises peuvent réduire le nombre d’heures de travail et augmenter la productivité. Il a transmis certaines idées du livre à un groupe de collaborateurs et de collaboratrices de Tux, et il leur a demandé de réfléchir à un nouvel horaire de travail. Même si le groupe a pris en considération d’autres idées, comme davantage de congés payés, un vendredi sur deux de congé ou des demi-journées de travail le vendredi, c’est le modèle de la semaine de quatre jours qui a suscité le plus son intérêt.
Toutefois, la transition vers la semaine de quatre jours nécessite de la volonté, des apprentissages et de la patience, selon Tremblay. « Il s’agit d’un grand changement de philosophie et la direction doit le soutenir. Chaque entreprise est différente. De ce fait, il doit y avoir une certaine flexibilité dans l’application du modèle. » Pour Tux, ces ajustements comprennent notamment le fait de travailler le vendredi lorsque le lundi est un jour férié.
L’offre d’un horaire qui soutient le bien-être des employé.e.s constitue un autre moyen pour Tux de donner vie à ses valeurs B Corp et de renforcer la résilience de son entreprise. « La semaine de travail de quatre jours constitue une excellente démonstration des avantages plus récents et plus progressistes qui existent pour les employé.e.s », a conclu Tremblay, en ajoutant que les résultats du changement comprenaient l’augmentation de la rétention et de la satisfaction des employé.e.s, ainsi que l’amélioration de la qualité du travail, et, d’une manière plus globale, de l’efficacité.
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