Un guide pour les entreprises prêtes à passer à la semaine de quatre jours

Pourquoi une semaine plus courte est-elle bénéfique aux entreprises et au bien-être?

« Aujourd’hui, le modèle désuet de la semaine de travail de cinq jours ne répond plus aux besoins des employé.e.s. La réduction de la semaine de travail permet de redonner une place centrale au bien-être du personnel, de lutter contre les inégalités économiques et de mettre le travail en phase avec les besoins de l’ère moderne. » — A.J. Schumann pour Inequality.org

Les pratiques commerciales et les produits ont évolué au fil du temps, mais les horaires de travail et les attentes aussi. De plus en plus, les entreprises se rendent compte que le fait de travailler un plus grand nombre d’heures ne résulte pas en une augmentation de la productivité et des bénéfices. En fait, c’est plutôt le contraire qui est habituellement vrai. 

La structure de travail qui gagne en popularité actuellement dans les entreprises est le modèle de la semaine de travail de quatre jours, une pratique qui vise à améliorer l’équilibre travail-vie personnelle et la résilience organisationnelle. La semaine de quatre jours consiste en une semaine de travail de 32 heures au cours de laquelle les employé.e.s travaillent pendant quatre journées de huit heures (au lieu de la semaine normale présentement en application aux États-Unis et au Canada qui compte cinq journées de huit heures) sans réduction des salaires. Le but de ce changement d’horaires est de libérer davantage de temps aux collaborateurs et aux collaboratrices pour des activités enrichissantes en dehors du lieu de travail. Il peut également permettre de combler l’écart grandissant entre l’augmentation de la productivité du personnel et la hausse des salaires, ainsi que de lutter contre l’aggravation des inégalités économiques. 

Étant pionniers et pionnières dans l’expérimentation de nouveaux modèles organisationnels et de nouvelles politiques, certaines entreprises certifiées B ainsi que le B Lab États-Unis et Canada ont adopté la semaine de quatre jours et encouragent les autres à faire de même. « Nous pouvons examiner les chiffres et nous constaterons que le passage à la semaine de travail de quatre jours est soutenu par des données probantes », a affirmé Devin Nelson, responsable de l’engagement communautaire au B Lab États-Unis et Canada. « Nous pouvons aussi simplement parler à nos équipes et découvrir que ce nouvel horaire permet aux membres du personnel de se rapprocher de la nature, de s’occuper de leurs proches malades, de prendre soin de leur santé, de faire leur deuil ou de se lancer dans un nouveau loisir : des indices qualitatifs qui sont tout aussi importants que les chiffres. »

Les entreprises qui envisagent d’adopter ce nouveau modèle peuvent s’inspirer d’un guide téléchargeable récemment publié par le B Lab États-Unis et Canada. Ce guide, intitulé « La semaine de travail de quatre jours : Pourquoi et comment adopter ce cadre de travail dans les entreprises afin de mieux concilier le travail et le bien-être » [en anglais], contient des ressources, des pratiques exemplaires et des leçons tirées des expériences d’entreprises et d’organismes, organisées en quatre sections principales : 

• Qu’est-ce que la semaine de travail de quatre jours et pourquoi ce cadre de travail est-il important?
• L’expérience du B Lab États-Unis et Canada : étude de cas sur l’adoption de la semaine de quatre jours
• Exemples et leçons tirées du passage à la semaine de travail de quatre jours de B Corp
• Lancez-vous : modèles et ressources pour commencer 

Qu’est-ce que la semaine de travail de quatre jours et pourquoi ce cadre de travail est-il important?

Les résultats d’essais menés dans le monde entier ont démontré l’impact positif de la semaine de travail de quatre jours sur le bien-être des employé.e.s (avec des réductions significatives des niveaux de stress et d’épuisement) et sur le résultat net des entreprises. Une étude a récemment été menée au Royaume-Uni [en anglais]. Elle impliquait des douzaines d’employeurs et employeuses, ainsi que des milliers de collaborateurs et de collaboratrices. Les résultats suggèrent que le fait de travailler seulement quatre jours par semaine en recevant le même salaire améliore le bien-être du personnel sans affecter la productivité des entreprises. 

Le passage à une semaine de travail plus courte entraîne des effets en cascade qui se ressentent de plusieurs façons, notamment : 82 % des entreprises participant à l’étude menée au Royaume-Uni ont déclaré avoir observé des impacts positifs sur le bien-être de leurs employé.e.s, 50 % ont constaté des effets positifs sur le roulement du personnel avec une réduction du taux de renouvellement de l’effectif et 32 % ont affirmé que la politique avait permis d’améliorer de façon notable leur recrutement. À une plus grande échelle, parmi les avantages sociaux et environnementaux d’une semaine de travail raccourcie, citons la réduction des émissions grâce à la diminution des déplacements entre le travail et le domicile, ainsi que l’avancement de l’équité entre les genres. 

Les femmes sont plus de quatre fois plus susceptibles [en anglais] que les hommes de travailler à temps partiel pour concilier leurs vies professionnelle et personnelle. La réduction des heures de tout le monde contribue donc à mettre les femmes sur un pied d’égalité.

« Le passage à la semaine de 32 heures de l’ensemble du personnel constitue une étape considérable vers l’égalité des genres », a affirmé Alexandra Lamoureux, consultante et associée chez Boite Pac, une B Corp basée à Montréal qui guide les entreprises au cours de leur transition vers la semaine de travail de quatre jours. « Lorsque les femmes peuvent travailler le même nombre d’heures que les hommes, elles bénéficient d’un meilleur accès aux promotions, aux postes de direction et à leur croissance professionnelle. »

L’expérience du B Lab États-Unis et Canada : étude de cas sur l’adoption de la semaine de quatre jours

Le B Lab États-Unis et Canada a commencé sa transition vers la semaine de travail de quatre jours à la suite d’une proposition faite par des employées et approuvée à l’unanimité lors d’une retraite d’équipe en avril 2023. Les membres de l’équipe qui ont présenté cette proposition, Devin Nelson, Denise Jones, Mariella Martin et Menucha Frischling, souhaitaient permettre aux gens d’avoir davantage d’espace pour se frayer un chemin au travers des complexités de la vie. 

En lançant le projet pilote de la semaine de travail de quatre jours en juillet 2023, le B Lab États-Unis et Canada s’est donné pour mission de répondre aux questions posées par l’équipe de la proposition : « Et si nous prenions collectivement du recul et décidions que la valeur d’une personne n’est pas déterminée par sa “productivité”, mais que nous acceptions plutôt que nous sommes déjà suffisant.e.s comme nous sommes lorsque nous nous manifestons tous les jours pour prendre soin de nous, des autres et de la planète? Et à quoi ressemblerait un système qui soutiendrait cette logique? » 

L’équipe a trouvé quelques réponses à ces questions lors de la période d’essai de six mois de cette structure de travail, ainsi que dans les résultats du sondage mené auprès des employé.e.s à la fin du projet pilote pour évaluer leur bien-être et leur productivité au travail. Sur la base de ces données, le B Lab États-Unis et Canada a décidé d’adopter officiellement la semaine de travail de quatre jours en avril 2024 et a commencé à planifier la transition. 

De quelle manière la semaine de quatre jours a-t-elle changé la routine professionnelle et la vie personnelle des collaborateurs et des collaboratrices du B Lab États-Unis et Canada? Voici quelques-uns de leurs points de vue et avis sur la question : 

• « J’ai l’impression que mes journées de travail sont mieux structurées et plus productives, avec moins de “temps morts” entre les réunions et les tâches à accomplir. Je commence mes journées un peu plus tôt et je finis éventuellement de travailler plus tard qu’avant la semaine de quatre jours, mais je me sens mieux grâce à cette routine. Je planifie également mes réunions d’une manière plus intentionnelle. »
• « J’encourage, moi-même et les autres, à mettre en priorité les tâches urgentes et opportunes. Ceci implique également de prendre des décisions et de communiquer en temps opportun, à l’interne comme à l’externe. Cependant, je souhaite clarifier que ce mode de travail ne crée pas l’illusion de fausses urgences ni n’a entrainé un changement d’état d’esprit résultant en une certaine précipitation dans l’accomplissement des tâches. »
• « J’ai observé des changements réfléchis dans le rythme des réunions, ce qui permet d’obtenir le répit nécessaire pour une semaine de travail de quatre jours. De plus, lors des rares périodes où j’ai plus de travail que ce qui peut être accompli en quatre jours, c’est agréable d’avoir les vendredis comme de vraies journées de calme, sans les petites requêtes du quotidien qui peuvent vous distraire. »

Orion Arrizón, responsable des opérations au B Lab États-Unis et Canada, a également fait part de sa réflexion personnelle sur le passage à la semaine de quatre jours. En effet, le projet pilote lui a permis d’obtenir un temps précieux, nécessaire pour accéder aux soins d’affirmation de genre. Grâce à cet espace supplémentaire, Arrizón a pu s’orienter dans les méandres des systèmes médicaux et judiciaires des États-Unis et peut désormais vivre selon ses termes : « Le fait simple, mais significatif, de disposer de davantage de temps m’a permis d’accéder à des soins, mais aussi de m’occuper de ma santé mentale pendant que je surmontais les obstacles épuisants qui se dressaient sur mon parcours vers les soins d’affirmation de genre. »

Exemples et leçons tirées du passage à la semaine de travail de quatre jours de B Corp

Le passage d’une organisation à une semaine de quatre jours nécessite bien plus qu’un changement d’horaires. Les entreprises doivent repenser leurs routines quotidiennes et envisager sous un nouvel angle leurs tâches et leurs priorités afin d’aider leurs collaborateurs et leurs collaboratrices à optimiser leur temps, au travail et en dehors, tout en s’occupant des activités essentielles. Il s’agit d’un processus qui requiert de la flexibilité et de la communication. 

Le nouveau guide élaboré par le B Lab contient des exemples et des pratiques de B Corp de toutes tailles qui ouvrent la voie en montrant aux autres entreprises comment instaurer une semaine de travail de quatre jours. 

• La B Corp Boite Pac, une société de conseils qui guide les entreprises au cours de la transition vers une semaine de quatre jours, et la B Corp Unilever Australie et Nouvelle-Zélande [en anglais] offrent un aperçu de ce à quoi une semaine de travail de quatre jours ressemble en pratique et elles soulignent certains des changements qu’elles ont dû mettre en œuvre pour réussir leur transition.  

• La B Corp Integrated Work [en anglais] utilise une approche centrée sur les personnes afin d’orienter son travail de conseil, de développement du leadership et de facilitation pour sa clientèle, qui sert également de valeur directrice à son équipe. Elle a lancé un projet pilote de la semaine de quatre jours en 2024 dans le but d’offrir davantage de temps et plus de flexibilité dans l’emploi du temps pour d’autres activités. Les membres de son équipe ont discuté de leurs interrogations et de leurs espoirs concernant le nouvel horaire [en anglais], ainsi que de sa potentielle signification pour leurs vies professionnelles et personnelles.
• En suivant l’exemple de certaines B Corp pionnières, le B Lab Europe [en anglais] et le B Lab Benelux [en anglais] ont mené un projet pilote de la semaine de travail de quatre jours [en anglais], une étape conçue pour favoriser un meilleur bien-être, une plus grande efficacité et une résilience accrue chez les membres de l’équipe. Cette initiative est en phase avec leur mission visant à stimuler des changements positifs et crée un précédent pour ouvrir la voie à une culture de travail plus équilibrée et durable. 
• Les B Corp Wakefield Agency [en anglais],  Cultivating Capital [en anglais], Conscious Revolution [en anglais], et Tux Creative donnent un aperçu de ce à quoi ressemble l’instauration de la semaine de quatre jours en pratique. Elles expliquent certaines des étapes graduelles qu’elles ont suivies afin de réduire le nombre d’heures de travail tout en maintenant leur productivité et leur rentabilité. D’une manière générale, elles ont mis l’accent sur la nécessité de communiquer, de faire preuve de transparence et de flexibilité, ainsi que de rendre des comptes, lorsque tout se déroule bien, mais aussi lorsque les choses deviennent un peu chaotiques.

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