Des combustibles fossiles aux énergies renouvelables : les entreprises peuvent stimuler les changements systémiques

L’écologiste Severn Cullis-Suzuki appelle les B Corp à ouvrir la voie en matière de justice climatique

D’après Severn Cullis-Suzuki, militante écologiste depuis toujours, les jours de la suprématie des combustibles fossiles sont comptés et il incombe à tout le monde, à la communauté des entreprises certifiées B et au-delà, de faire ce qui est nécessaire pour passer aux sources d’énergies renouvelables le plus rapidement possible. En tant que directrice générale de la Fondation David Suzuki, basée à Vancouver, Cullis-Suzuki guide l’organisme dans son travail de conservation et de protection de l’environnement naturel par le biais de la recherche, de l’éducation et de l’analyse de politiques fondées sur des données probantes.

Selon Cullis-Suzuki, la domination des combustibles fossiles est ancrée dans des pratiques extractives colonialistes soutenues par le racisme et le capitalisme. La compréhension de ce contexte fait partie du processus à suivre pour se libérer de la dépendance à l’égard de ces combustibles fossiles. D’après elle, les dernières années ont été marquées par une prise de conscience croissante de ce système, ainsi que de ses coûts humains et environnementaux. Même si elle considère que le changement est inévitable, le rythme auquel ce changement se produit est essentiel. 

« Ce n’est pas évident de faire plier ce système et sa structure. Il faudra que tout le monde s’y mette », a déclaré Cullis-Suzuki. « Cela prend l’ensemble des personnes dans cette salle, en plus du travail que nous accomplissons, et même au-delà de la communauté B Corp, pour parvenir à réaliser cette transformation des systèmes. La vitesse à laquelle elle se produit est très importante. Chaque effort que nous repoussons à plus tard se traduit par une augmentation du degré de réchauffement de la planète et des changements climatiques. »

Cullis-Suzuki a prononcé un discours lors de la retraite des champion.ne.s 2024 [en anglais], une conférence organisée pour la communauté des entreprises certifiées B des États-Unis et du Canada. Le thème de la retraite, « Restaurer », invitait les participant.e.s à explorer le sujet de la guérison collective, ainsi que de nouvelles manières de prospérer pour les personnes et la planète. L’impact environnemental compte parmi les valeurs fondamentales des B Corp, qui s’efforcent de faire avancer la justice climatique en donnant une place centrale aux besoins et aux voix des personnes les plus touchées par le changement climatique. 

Abandonner l’économie des combustibles fossiles

Cullis-Suzuki a consacré sa vie à militer pour la justice environnementale et intergénérationnelle, soit la justice pour les prochaines générations. Lorsqu’elle était enfant, ses profondes préoccupations pour l’environnement l’ont amenée à créer la Environmental Children’s Organization (l’organisme des enfants pour la défense de l’environnement) [en anglais] avec des ami.e.s. Quelques années plus tard, à l’âge de 12 ans, elle a prononcé un discours à la tribune du Sommet de la Terre des Nations Unies. Son message de 1992 continue de résonner aujourd’hui : « En venant ici aujourd’hui, je ne dissimule aucune ambition. Je me bats pour mon avenir. » 

Dans le cadre de son travail de défense actuel, Cullis-Suzuki poursuit son combat pour l’avenir en encourageant le recours aux énergies solaire et éolienne comme solutions plus économiques et régénératrices pour remplacer les combustibles fossiles. Par exemple, elle affirme que la recherche et les modèles auxquels la Fondation David Suzuki a collaboré [en anglais] démontrent que l’économie de l’énergie canadienne peut provenir entièrement de sources renouvelables d’ici 2035. 

« Cela est tout à fait possible à l’échelle municipale et communautaire », a-t-elle déclaré. « La révolution de l’énergie est en marche. » 

Le rôle des B Corp dans la transformation du capitalisme

Au Canada, ce sont les peuples autochtones qui ouvrent la voie, comme elle l’a expliqué. Les Nations autochtones comptent parmi les plus grand.e.s propriétaires d’actifs dans le secteur des énergies renouvelables, juste derrière le gouvernement fédéral et les services publics canadiens. D’après elle, ces progrès prouvent que les combustibles fossiles ne doivent pas constituer le statu quo. Ils démontrent aussi que les actions des B Corp s’inscrivent dans un mouvement plus vaste visant à démanteler les systèmes du capitalisme et du colonialisme qui soutiennent la suprématie des combustibles fossiles. 

Au travers de leur travail pour s’éloigner d’une économie axée sur les actionnaires au profit d’une manière de faire des affaires qui tient compte de toutes les parties prenantes, les B Corp s’emploient à redéfinir ces systèmes afin de mieux servir les personnes et l’environnement, comme elle l’a mentionné. 

« Il s’agit d’une période critique, mais c’est aussi une époque qui offre des occasions considérables, car nous pouvons percevoir des fissures dans le système », a-t-elle avancé. « L’une des choses les plus importantes est de comprendre comment ces systèmes s’entrecoupent et se brisent, mais aussi ce que nous souhaitons voir émerger de leurs cendres. Il s’agit de ce sur quoi chacun et chacune d’entre vous travaillent. Vous vous employez à trouver une réponse aux questions : “Et après?”, “Et si?” et “Que pouvons-nous faire?” » 

Cullis-Suzuki a expliqué que, lorsqu’elle a découvert que la mission de la communauté B Corp impliquait de transformer le capitalisme, elle s’est dit : « Si c’est vraiment le cas, alors “j’appartiens à ce groupe de personnes”. » Les conversations et les messages entendus à la retraite des champion.ne.s renforcent le fait que les B Corp sont déterminées à réaliser une telle transformation en créant une économie qui soutient la justice, l’antiracisme, la durabilité, ainsi que la santé et le bien-être des personnes et de la nature. 

« L’ampleur du capitalisme mondial a découplé nos stratégies humaines éprouvées par le temps en matière de survie, d’examen et de compréhension du lien de cause à effet, ainsi que des actions tirées des conséquences », a-t-elle souligné. « En l’espace de quelques générations, le système a métamorphosé le visage de la Terre et l’identité même de notre espèce. Aujourd’hui, nous en sommes à la sixième extinction massive et aux prémices du changement climatique […] cette cause est donc absolument essentielle à la survie de notre espèce. Voilà notre travail. »